Shows / Concerts
Présentation de la saison
© Christophe Raynaud de Lage
D’un territoire, l’autre…
À l'approche d'une nouvelle ère, qui verra bientôt la programmation de spectacles vivants se déployer dans de multiples lieux à Paris et dans la France entière, nous interrogeons cette saison notre rapport aux territoires : les territoires que l'on habite, ceux que l'on croit connaître, que l'on a oubliés et ceux dont on ne comprend plus les règles. Les territoires que l'on clôture, ou bien ceux qui ne sont ouverts qu'à certains. Ces territoires réels ou cartographies imaginaires – poétiques et politiques – que les arts de la scène convoquent.
Patricia Allio, avec Dispak Dipac'h, envisage la salle de spectacle comme un carrefour ; lieu possible où se croisent enfin les paroles, les témoignages de ceux qui vivent de part et d'autre des murs qui nous séparent. Dans cet agora quadri frontale, le public se mêle aux interprètes, à des membres de la société civile, ainsi qu'à celles et ceux qui ont quitté leur terre natale dans l'espoir d'un refuge. Un espace décloisonné pour questionner le caractère parfois inique des règles qui régissent nos territoires et leurs frontières.
Judith Butler, invitée intellectuelle du Centre Pompidou pour 2024, convie la performeuse et universitaire chilienne Maria José Contreras à poursuivre par le concret du plateau son investigation théorique autour de la question du deuil : « Qu'est-ce qui fait qu'une vie mérite d'être pleurée ? ». Sur la piste des Antigone d'aujourd'hui, Antigone Adrift cherche des réponses à l'intérieur d'une topographie intime et politique où les territoires se confondent.
Par les villages propose de nous « décentrer » en faisant entendre la voix de celles et ceux qui peuplent les territoires confinés au silence, car relégués dans les marges invisibles des périphéries. À travers cette recontextualisation personnelle de l'œuvre de Peter Handke, Sébastien Kheroufi transpose le monde rural des années 1960 à celui des grands ensembles des banlieues. Une ambitieuse création in situ qui débute directement dans le Forum, mobilisant en plus des interprètes professionnels, une cinquantaine d'habitants et d'habitantes d'Ivry-sur-Seine.
Cette proposition fait écho à celle de Bintou Dembélé qui poursuit la collaboration engagée cet automne avec le Centre Pompidou, et entend réfléchir sur ce qui constitue « les nouveaux courants de cultures populaires des périphéries » autour de trois évènements : Palabre, un temps de discussion collective réunissant des artistes de disciplines différentes ; une séance du Laboratoire d'histoire permanente du Centre Pompidou, et Rite de passage – performance solo II, un geste en quête d'émancipation, situé entre différents territoires chorégraphiques qui augure le passage d'un périmètre clôturé à un espace de liberté.
Pour Atsumori, la chorégraphe et plasticienne portugaise Catarina Miranda imagine une danse spectrale en revisitant les codes du théâtre nô où les corps naviguent entre le rivage des morts et celui des vivants. Baignée dans une lumière évanescente – diffractée par des miroirs – la salle de spectacle devient un espace liminaire, un seuil qui sépare et réunit à la fois.
La programmation musicale nous fait emprunter des chemins de traverse entre nostalgie et nouveauté. MEMORIALS, mythique groupe de la scène pop indépendante britannique donne un concert exceptionnel avec notamment quatre morceaux inédits inspirés d'une œuvre de la collection du Centre Pompidou. Vale Poher et Porridge Radio s'emparent de la Grande salle pour y présenter leur album et de nouvelles créations. Caterina Barbieri, virtuose de l'electro, rend hommage à Mego en réunissant des artistes emblématiques du label, entre la Grande salle et l'Ircam.
Cette saison dessine de nouveaux territoires utopiques imaginés spécialement pour les espaces du Centre Pompidou, foyer d'un possible renouveau où naît le désir d'une réparation collective par les moyens de la scène.
