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Le Baiser

1907-1938

Constantin Brancusi

Le premier Baiser de 1907-1908 représente une rupture essentielle dans l’œuvre de Brancusi. Avec cette œuvre, Brancusi se dégage de Rodin. Il cherche une nouvelle réalité plastique. Pour lui, la sculpture a une fonction spirituelle qui ne réside pas dans l’apparence mais dans un principe de réalité inscrit au cœur de la matière. Il doit respecter la vocation formelle de la pierre ou du bois en travaillant à la taille directe, sans ébauche préalable, pour révéler « l’essence cosmique de la matière ». Le processus de la taille directe se substitue à la représentation du modèle. « C’est en taillant la pierre que l’on découvre l’esprit de la matière, sa propre mesure. La main pense et suit la pensée de la matière. » Mais le matériau impose une résistance qui ne permet pas de parvenir à des détails. Pour Brancusi c’est le moyen d’atteindre à la simplicité des formes.

 

Le Baiser se présente comme un bloc de pierre à peine dégrossi, dans lequel s’inscrivent deux bustes vus de profil et accolés l’un à l’autre. Seuls la différence des chevelures et le sein légèrement apparent de la femme permettent de percevoir la présence des deux êtres. La jonction parfaite des bouches et des yeux et l’enlacement des bras métamorphosent les corps en un être unique vu de face. Cette double présence accentue fortement l’unité du bloc de pierre et apparaît comme une métaphore de l’artiste face à sa matière.

 

Quand, en 1910, Brancusi reprend le thème du baiser pour un monument funéraire en souvenir d’une jeune fille russe qui s’est suicidée par amour, les bustes des deux corps sont prolongés par leurs jambes accolées, rappelant une tradition roumaine selon laquelle deux arbres plantés l’un à côte de l’autre, près d’une tombe, évoque la force de l’amour face à l’éternité. « J’ai voulu évoquer non seulement le souvenir de ce couple unique mais celui de tous les couples du monde qui ont connu l’amour avant de quitter la vie », dit-il.

 

La Porte du Baiser, réalisée par Brancusi en 1938 pour le monument aux morts de Târgu Jiu dans sa province natale, sera l’accomplissement de ce thème.


Pour aller plus loin

Brancusi et le thème du Baiser dans la collection du Centre Pompidou

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