Exposición / Museo
Macao
Ou jouer la différence
20 jul - 17 oct 1983
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L’exposition Macao ou jouer la différence, expose, à titre exemplaire, la problématique de la mondialité des échanges : du risque d’uniformité ou du rabotage des différences opposés, au jeu complexe des dissemblances, débouchant sur des identités et originalités multiples.
Il existe deux manières d’atteindre Macao. A partir de Canton et de la campagne chinoise. Ou depuis Hong Kong. La première décrit la ville, au-delà des rizières, comme un cristal chargé de lumières, d’impulsions, de mystères ; un lieu fantasmagorique pour le paysan qui la distingue de loin, avec ses casinos constellés d’étoiles, ses hôtels éblouissants de mouvements, ses façades marquées par d’autres régions du monde, d’autres temps. La seconde fait succéder, en quelques minutes de navigation, l’agglomération la plus contemporaine de la planète à un vieux comptoir colonial en état de métamorphose.
Pourquoi Macao ?
Macao, premier comptoir fondé sur une terre chinoise, porte ouverte aux rapports entre l’Occident et l’Orient, point fort d’un jeu subtil d’emprunts et d’échanges qui se déroule depuis des siècles dans cette partie du monde.
Macao n’est pas une conquête des Portugais ; elle leur est donnée en 1557, « pour ce grand et mémorable service qu’ils rendirent au Roi de Chine - mettre les pirates en déroute ». Si conquête il y a, c’est une conquête pacifique de commerçants, mais aussi d’écrivains, de chroniqueurs, de physiciens, de cosmographes, de linguistes, d’aventuriers.
Mais c’est aussi une terre de croisement, de métissage : une greffe pacifique. L’espace urbain y est devenu le miroir de cette patiente cohabitation, de cette facilité d’appropriation, de détournement propres aux 96% de Chinois qui , aujourd’hui, habitent une ville au tracé portugais, qui partout ont marqué de leurs signes une architecture destinée à d’autres. Le charme de Macao est justement fait de cette juxtaposition d’un temple chinois et d’un couvent catholique, d’un village han et d’un palais portugais. C’est ici qu’a été construit le premier hôpital et que s’installe le premier pharmacien occidental à côté de l’apothicaire traditionnel ; c’est ici que s’ouvrent, en terre chinoise, le premier séminaire et la première université chrétienne et que se développent, côte à côte, cimetières catholique, protestant, chinois et parsi.
L’inscription dans l’espace bâti de cette cohabitation pacifique est d’autant plus frappante que le phénomène urbain se pose à Macao de façon exacerbée. Une ville sans « hinterland », sans le moindre territoire sur lequel s’appuyer. L’urbanité enclavée sans aucune échappée vers un espace rural, une cité à l’état pur ; et pour ceux qui s’y fixent, un lieu où le passage de la campagne à la ville devient irréversible.
Pourquoi la différence ?
A quelques 40 km de Hong Kong, Macao porte aujourd’hui en elle le signe de la différence. « Territoire chinois administré par les Portugais », étonnant statut politique. Ville en marge de Hong Kong, grande capitale internationale au grouillement de gratte-ciel, en marge aussi de la Chine rurale contigüe ; mélange hybride de deux mondes, sans modèle précis, mutant. Passé et présent s’y superposent en une structure très caractéristique à laquelle la bâtisse humoristique du Lisboa - son célèbre casino - ajoute une note ludique inattendue. Dans un monde uniformisé, ce seul constat et la lecture raisonnée de ses composantes, ne manquent pas d’intérêt.
Pourquoi jouer la différence ?
Cependant, Macao n’est pas une cité morte, un monument historique qu’il faudrait préserver, restaurer, figer. Un simple inventaire n’est pas suffisant. Quel sera le développement de cette ville, comment s’inscrira-t-il dans la silhouette urbaine ? Macao deviendra-t-elle un faubourg de Hong Kong ou sa salle de jeux ? Ou saura-t-elle, dans une situation conflictuelle, développer sa spécificité dans la différence ; justifier cette différence, jouer avec cette différence ? Cette problématique n’est pas propre à Macao ; d’autres espaces urbains, nombreux, aux caractéristiques fort diverses, se trouvent placés devant des choix analogues. Mais Macao la vit de façon particulièrement aigüe puisque son destin se jouera dans les prochaines années.
D’après Hèlène Larroche, catalogue de l’exposition
Quando
todos los días excepto martes