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« Over the Rainbow », de l'autre côté des luttes

Réunissant plus de cinq cents œuvres et documents (films, photographies, magazines etc.) principalement issus de la collection, l'exposition « Over the Rainbow » raconte en images comment, depuis le début du 20e siècle, les artistes ont contribué à transformer la représentation des sexualités dites « minoritaires ». De Jean Cocteau à fierce pussy en passant par Romaine Brooks ou Kenneth Anger : un voyage dans la culture visuelle LGBTQIA+. Présentation par Nicolas Liucci-Goutnikov, commissaire de l'exposition.

± 4 min

"A friend of Dorothy's". Longtemps, dans la communauté gay, c'est grâce à ce nom de code (« un ami de Dorothée », du nom du personnage de Judy Garland dans Le Magicien d'Oz, 1939) que les homosexuels pouvaient discuter entre eux librement de leur orientation sexuelle. C'est dans le film culte de Victor Fleming que la jeune actrice entonne le thème « Over the Rainbow », ce fameux pays de l'arc en ciel qui donnera ses couleurs au drapeau LGBTQIA+.

 

Réunissant plus de cinq cents œuvres et documents principalement issus de la collection du Centre Pompidou, l’exposition « Over the Rainbow » se propose de montrer comment, depuis le début du 20e siècle, les artistes ont contribué à transformer la représentation des sexualités dites « minoritaires » et ont participé aux luttes menées par les communautés LGBTQIA+ pour la reconnaissance de leurs droits, accompagnant en cela un mouvement d’émancipation ayant vu la formation de subcultures transgressives en partie clandestines ouvrir la voie, à la fin des années 1960, à l’affirmation d’une action militante pleinement exercée dans l’espace public. 

 

Loin d’offrir un récit unidimensionnel, « Over the Rainbow » propose une constellation d’œuvres diverses ayant pour point commun d’affirmer, chacune à sa façon, ce que dénigre la représentation homophobe.

 

Loin d’offrir un récit unidimensionnel, « Over the Rainbow » propose une constellation d’œuvres diverses ayant pour point commun d’affirmer, chacune à sa façon, ce que dénigre la représentation homophobe. Ancrées dans une dimension éminemment sociale, les œuvres présentées se déploient principalement dans les disciplines de la reproduction mécanique, seules susceptibles d’offrir une diffusion élargie, comme le cinéma ou l’imprimé. La collection de la Bibliothèque Kandinsky est ainsi largement sollicitée : grâce au soutien institutionnel de Gilead Sciences, celle-ci s'est récemment enrichie de plusieurs centaines d’items — livres illustrés, photographies, revues ou queer zines — formant une vaste archive de la culture visuelle LGBTQIA+ des 20e et 21e siècles.

L’exposition présente une série d’ensembles bâtis à partir de la collection du Centre Pompidou : le salon lesbien de Natalie Clifford Barney, lieu de fermentation artistique d’une pensée alternative à la croisée des disciplines ; l’œuvre homoérotique de Jean Cocteau, auteur après André Gide d’un des premiers ouvrages littéraires militants, Le Livre blanc (1928) ; la photographie de l’entre-deux-guerres, médium privilégié d’expression du désir homosexuel chez Florence Henri ou Raymond Voinquel ; le théâtre des inversions du Paris des années folles, où les genres se troublent ou s’échangent dans l’œil d’un Brassaï ou d’une Gerda Wegener ; l’« homosexualité noire » du Jean Genet de Querelle de Brest (1947) et d’Un chant d’amour (1950) ; l’émergence de la culture du cuir à la fin des années 1960, chez Kenneth Anger (récemment disparu) ou Nancy Grossman ; les productions graphiques et vidéos du militantisme, dans les années 1970, autour du Front Homosexuel d’Action Révolutionnaire (FHAR) ; la réponse de collectifs d’artistes antisida comme Boy / Girl with Arms Akimbo à l’inaction voire au déni des pouvoirs publics ; l’affirmation de la théorie queer dans les années 1990 et le développement de formes d’art contemporaines mêlant aux questions de sexualité, celles du genre, de l’origine ethnique et / ou de la classe sociale. Un autre regard sur la collection du Centre Pompidou. ◼