La plus belle!
[1984]

La plus belle!
[1984]
Domain | Dessin |
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Techniques | Encre de Chine sur papier |
Dimensions | 20 x 26,4 cm |
Acquisition | Achat, 1985 |
Inventory no. | AM 1985-389 (4) |
Is part of the set |
La plus belle! Série (Dissociable set of artworks) |
Detailed description
Artist |
Viatcheslav Syssoev
(1937, URSS - 2006, Allemagne) | |
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Main title | La plus belle! | |
Creation date | [1984] | |
Is part of the set | La plus belle! Série (Dissociable set of artworks) Série de 11 dessins d'après la Vénus couchée de Giorgione à Dresde vers 1984 | |
Domain | Dessin | |
Techniques | Encre de Chine sur papier | |
Dimensions | 20 x 26,4 cm | |
Inscriptions | Signé et numéroté au stylo en bas à droite : (en cyrillique) V.SYSSOEV/ 4 | |
Acquisition | Achat, 1985 | |
Collection area | Cabinet d'art graphique | |
Inventory no. | AM 1985-389 (4) |
Analysis
Si l’appel aux poncifs de la beauté et de l’art classiques est fréquent dans l’art contemporain – les avatars de Vénus y sont nombreux –, il est plus intriguant de voir ces références – et avec elles l’image de la déesse – reprises, exploitées par certains artistes soviétiques : dans l’ère de liberté offerte, pendant les années 1980, par la glasnost et la perestroïka, ils n’hésitent pas, comme Syssoïev, à se débarrasser ouvertement des carcans de la peinture officielle pour donner à voir leur critique de la réalité soviétique.
Artiste caricaturiste dissident par excellence, Syssoïev, à qui le KGB confisque en 1979 des œuvres jugées « antisoviétiques » et « pornographiques », trouve refuge à Berlin, où il émigre en 1989. Choisissant la Vénus endormie de Giorgione [1510], conservée au musée de Dresde, il en dévoie le sens – à travers un récit en onze planches dessinées qui traitent autant de situations – en mêlant ironiquement à l’image convenue de la déesse des accessoires très contemporains, icônes de la modernité russe : hélicoptère, poste de radio, dessous affriolants, seringues, casque d’écoute, affiches de rock, blue-jeans, attirail d’armement, poisson séché, vodka… De même, dans chaque planche, un nouveau cadre dégradant (cité dortoir, atmosphère polluée d’usine, chambre d’appartement communautaire, cellule de prison graffitée, isba kolkhozienne… – sert d’écrin à la déesse, qui rêve d’autres ailleurs. Vénus est devenue une femme de mauvaise vie, transportée à différentes époques de l’ère soviétique, dans les lieux les plus quotidiens de la réalité populaire. Stylisée au trait noir, colorée dans les deux premières images comme pour un dessin animé ou une affiche publicitaire, la voici héroïne de bande dessinée, indifférente à son sort, passant du statut d’objet unique de consommation à celui d’objet multiple sur lequel marchent triomphalement les soldats de l’armée soviétique. Syssoïev, dont l’humour est caustique, la plume ou le crayon fébriles, précis, ne cache pas l’opinion critique qu’il a de son pays et du Parti : il réalise la série La Plus Belle ! après avoir été déporté à Arkhangelsk, puis libéré grâce au soutien d’artistes étrangers (en France, ses albums de caricatures La vie est devenue meilleure et Silence, Hôpital ! sont publiés chez Maspero et Scarabée and Co respectivement en 1980 et 1984).
Syssoïev est considéré comme un des artistes les plus virulents du Sots Art (concentration des termes « socialisme » et « art »), qui s’est développé dans les années 1970-1980 en Union soviétique. Ses œuvres sont présentes aux côtés de celles de Kabakov, Kossolapov, Prigov, Orlov et du groupe Gnezdo, dans l’exposition organisée à La Maison rouge à Paris en 2007-2008.
Macha Daniel
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008