Sans titre
1966

Sans titre
1966
Domain | Dessin |
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Techniques | Gouache et aquarelle sur papier de soie tressé, agrafé sur toile |
Dimensions | 239 x 160,5 cm |
Acquisition | Achat, 1976 |
Inventory no. | AM 1976-254 |
Detailed description
Artist |
François Rouan
(1943, France) |
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Main title | Sans titre |
Title given | Tressage de papier |
Creation date | 1966 |
Domain | Dessin |
Description | Technique de "Tressage", (1966-1967), utilisant en chaîne et en trame des bandes de papier de soie préalablement colorées, découpées, collées et retravaillées à la gouache et à l'aquarelle |
Techniques | Gouache et aquarelle sur papier de soie tressé, agrafé sur toile |
Dimensions | 239 x 160,5 cm |
Inscriptions | Signé et daté en bas à droite : ROUAN-66- |
Acquisition | Achat, 1976 |
Collection area | Cabinet d'art graphique |
Inventory no. | AM 1976-254 |
Analysis
Proche du groupe Supports/Surfaces au milieu des années 1960, François Rouan participe, comme bien des artistes de sa génération, à la remise en question fondamentale de la peinture avec des expérimentations sur papiers gouachés qu’il nomme « tressages » : « J’ai rencontré le tressage en 1966. […] J’ai commencé par découper des papiers et les tresser ensemble. […] D’abord ce ne fut qu’un moyen d’échapper à mon inhibition devant la toile blanche. […] Et puis au bout d’un certain temps je me suis aperçu de l’importance de l’acte même de tresser, ou plutôt de l’importance du tressage dans les œuvres qui me touchaient. » Rouan utilise de fragiles papiers de soie, soumis à de multiples opérations de colorations, découpages et collages, retravaillés ensuite pour produire un objet à la fois brutal et subtil, à mi-chemin entre dessin et collage. Y sont souvent superposées trois couches différentes, la dernière étant constituée d’un réseau de signes dessinés, en obliques ou en croix, formes qui font écho à l’orthogonalité du tressage. Ce procédé artisanal, qui ira en se complexifiant, va correspondre intimement à ses aspirations et devenir la marque même de son art. En effet, après ses premiers tressages de papier, héritiers directs des gouaches découpées de Matisse, mais aussi du cubisme par la grille et les facettes suggérant la profondeur, Rouan va appliquer ce même procédé à sa peinture. Il tressera ses bandes de toile préalablement découpées pour créer une surface vibrante sur laquelle il superposera des strates de peinture toujours plus élaborées, y faisant apparaître des signes puis des figures pris dans le réel ou issus notamment de ses séjours italiens.
Nadine Pouillon
Source :
Extrait du catalogue Collection art contemporain - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Sophie Duplaix, Paris, Centre Pompidou, 2007
Analysis
Dès 1964, François Rouan réalise des papiers gouachés, découpés et collés. En 1966, dans la défiance du groupe Supports-Surfaces qui se constitue alors, et suivant une technique qu’il pratique depuis l’année précédente, il construit de grandes peintures de papiers nattés. Dans la grande composition Sans titre, il procède par bandes roses, bleues, blanches qui se croisent, se dominent tour à tour et se font disparaître, à angle droit – c’est la loi du tissage à armure toile – et le procédé apporte, outre le demi-enfouissement de la matière et l’engagement du support dans la construction du plan, une multitude de points de croisement, de lieux de confluence : c’est-à-dire un conflit en puissance, que signalent et soulignent des traits obliques, là noirs, ici abîmés dans l’épaisseur du tressage, ailleurs verts. Ce conflit latent n’est pas chromatique – jamais le bleu contre le blanc, le vert contre le noir –, il reste discret mais insoluble. Cette construction graphique est un réseau sémiotique, son modèle est tabulaire, le tressage de papier l’infrastructure d’un savoir et d’une saveur. Le croisement est sa matrice, le carré, son unité, l’oblique son biais. Bandes et couleurs, prises dans le tissage, en plan comme en épaisseur, sont les figures discontinues de la constance d’un discours qui ne se dit pas. Elles s’imposent et se répètent, se répètent et s’imposent. Le pinceau ruse avec elles, s’impose et se répète. Il dit l’art. Ensemble, cela forme un tout, réglementé, mais qui s’arrête avant de devenir loi ou science, quoiqu’en s’approchant des fondements de la conscience comme de la matérialité. L’abstraction y est poussée sans minimalisme, mais via le Matisse des papiers découpés, à son point de vulnérabilité. Cette démarche, François Rouan l’applique ensuite à la toile – découpage en bandes du « déjà peint », tissage qui refait toile, et reprise au pinceau qui renforce et refoule les deux temps précédents –, avec la double ambition d’enfouir et de fragmenter la peinture.
À Rome, où il travaille à la Villa Médicis, de 1971 à 1974, puis à Lunghezza, près de Tivoli, de 1975 à 1978, les dessins en noir et blanc décantent et enchantent justement des fragments : murs peints, frondaisons et bosquets, marbres veinés, nervures labyrinthiques des façades et des toits. François Rouan les ramène, traits après traits et points par points, à leur ossature ou alors à leurs atomes, à leur poussière. Dans Le Jardin et la Ville (1981), trois ans après le retour de Rome, toutes les trames de ces dessins, qui portent souvent, depuis 1973, le même titre, se superposent et se rejouent ensemble, interdisant toute reconnaissance d’un motif particulier : apparaît l’ombre qui traverse l’Italie des idylles sur carroyage sous-jacent, qui reste la matière à une interprétation, physique et métaphysique, des signes produits par le croisement. L’Italie, pas celle des ruines, mais celle des tessons, « guenilles, loques, mosaïques », dit Rouan, « opus incertum », ajoute-t-il, prête ses mots au dessein de l’œuvre : dans Volta faccia, « volta » pourrait signifier le détour ou le retour, ce qui tourne comme une voûte ou une danse, le méandre d’un fleuve, les circonvolutions divagantes sur un thème, les mouvements d’un objet sur lui-même, les errances de la promenade et de l’humeur, une fois et toutes les fois ; « faccia », le devant d’une tête, le masque, la part visible des corps, des âmes, des astres. Volta faccia, ce serait précisément la volte-face qui affronte deux faces de femme(s). Dans le dessin apparaissent en fait trois profils féminins, une face et son masque (très Picasso années soixante), et qui sont ce que la figure est quand elle confine au portrait : ce qui ne peut disparaître de ce qui a disparu, une survivance. Gonflée la face, chauve la tête, peignées les hachures et la mort à l’œuvre, comme dans un bois gravé d’un maître germanique : tout cela fragmenté en rhombes jusqu’à atteindre une saturation égale à celle du cubisme analytique. Analytique comme l’est l’art de François Rouan.
Dominique Cordellier
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Bibliography
La Collection du Musée national d''art moderne. Catalogue établi par la Conservation du Musée. - Paris : éd. du Centre Pompidou, 1986 / rééd. 1987 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle et Nadine Pouillon) (cit. et reprod. coul. p. 515) . N° isbn 2-85850-292-7
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Les années Supports/Surfaces dans les collections du Centre Georges Pompidou : Paris, Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998 (cit. p. 122, reprod. coul. p. 123) . N° isbn 2-85850-665-5
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François Rouan, papiers découpés : Paris, Somogy, 2000 (cat. n° 17, cit. p. 107, reprod. coul. p. 63) . N° isbn 2-85056-395-1
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Collection art contemporain : Paris, Musée national d''art moderne, sous la dir. de Sophie Duplaix. - Paris : Centre Pompidou, 2007 (cit. et repr. coul. p. 396) . N° isbn 978-2-84426-324-7
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Invention et transgression, le dessin au XXe siècle : Collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne, Cabinet d''art graphique : Besançon, Musée des beaux-arts et d''archéologie, 27 avril-27 août 2007.- Paris : Editions du Centre Pompidou, 2007 (reprod. coul. p. 52) . N° isbn 978-2-84426-326-1
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Collection art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle, (Sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle).- Paris : Editions du Centre Pompidou, 2008 (cit. et reprod. coul. p. 358-359) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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