Droller (First object aerated)
[1918 - 1919]
Droller (First object aerated)
[1918 - 1919]
Ámbito | Dessin |
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Técnica | Mine graphite et encre vaporisée sur papier |
Medidas | 27,6 x 22,7 cm |
Adquisición | Don de Société des Amis du Musée national d'art moderne, 1995 |
Inventario | AM 1995-200 |
Información detallada
Artista |
Man Ray (Emmanuel Radnitzky, dit)
(1890, États-Unis - 1976, France) |
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Título principal | Droller (First object aerated) |
Fecha de creación | [1918 - 1919] |
Ámbito | Dessin |
Técnica | Mine graphite et encre vaporisée sur papier |
Medidas | 27,6 x 22,7 cm |
Inscripciones | Signé et daté en bas à droite : Man Ray 1919 |
Adquisición | Don de Société des Amis du Musée national d'art moderne, 1995 |
Sector de colección | Cabinet d'art graphique |
Inventario | AM 1995-200 |
Análisis
Acteur important de Dada New York, aux côtés de Marcel Duchamp, qu’il fréquente alors assidûment, Man Ray poursuit à la fin des années 1910 une activité de peintre et commence à photographier, tout en gagnant sa vie comme dessinateur industriel chez un éditeur de cartes et d’atlas. C’est dans ce contexte professionnel qu’il découvre l’aérographie : un procédé permettant de projeter de l’encre ou de la peinture à l’aide d’un pulvérisateur à air comprimé. Droller (First Object Aerated), comme son titre le précise, est l’une des premières œuvres réalisées avec cette technique, vers 1918-1919. L’image a été obtenue en plaçant sur une feuille de papier recouverte d’un carton évidé en ovale un petit étau à main, outil habituellement utilisé pour maintenir deux pièces de bois fortement pressées l’une contre l’autre. L’artiste a ensuite pulvérisé de l’encre noire autour de l’objet, en prenant soin de faire varier l’angle de projection pour donner un certain relief à l’image en réserve. Il a enfin légèrement retouché son dessin à la mine graphite afin de rendre l’objet davantage reconnaissable. L’usage de la peinture au pistolet permet à Man Ray de s’affranchir radicalement des procédés habituels du peintre : non seulement d’en finir avec la sensualité ou l’expressivité de la touche, mais aussi d’abolir tout contact direct avec la matière picturale.
L’adoption de cette technique industrielle, associée ici au choix d’un outil comme motif, s’inscrit pleinement dans une « esthétique de la machine » qui émerge avec Dada et dont les œuvres de Duchamp ou de Picabia réalisées à New York à la même époque témoignent également. C’est d’ailleurs précisément le Droller qui illustrera une des toutes premières tentatives d’histoire du mouvement, « L’Esprit Dada dans la peinture - New York », publiée par Georges Hugnet dans Cahiers d’art en 1932. Le titre même de l’œuvre, qui évoque une chose étrange et amusante (drôle, selon la probable origine française de ce néologisme), constitue par ailleurs l’une des premières manifestations de la fascination de Man Ray pour les objets insolites parce que décalés, déplacés ou simplement défonctionnalisés – fascination dont une bonne part de sa production Dada de New York se nourrit et qu’il développera davantage encore à Paris, au sein du surréalisme.
Parmi toutes les aérographies réalisées par Man Ray, Droller est sans doute celle qui annonce le plus clairement le principe de la rayographie, redécouvert par l’artiste au début de 1922. La disposition des objets à même le papier, le principe de projection (d’encre dans un cas, de lumière dans l’autre), l’apparition de formes en réserve, mais aussi la mécanicité du procédé, sa rapidité, sa tonalité noir et blanc, tout dans la rayographie rappelle l’aérographie, y compris l’homophonie des deux termes. Évoquant cette dernière dans un entretien, Man Ray expliquait : « C’était mon projet d’exprimer une idée presque photographiquement, avant même de me mettre à la photographie » (Naumann, 2003, p. 204). Plusieurs des objets utilisés dans les aérographies, dont le petit étau de Droller, réapparaîtront d’ailleurs dans des rayographies. L’œuvre marque en ce sens un pas décisif dans l’évolution de Man Ray vers la photographie et la désincarnation du geste pictural.
Clément Chéroux
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008