Screening
Une histoire du cinéma, vol. 17
21 May 2025
21 May 2025

Le découpage chronologique des projections de « Une histoire du cinéma » *, qui se déroulent en 1976 et 1977, permet de rassembler des films apparemment très éloignés les uns des autres. Cette distance, tantôt géographique tantôt artistique ou plus largement « culturelle », est abolie dans le rapprochement produit par les projections, au profit de la seule synchronie temporelle : l’année de réalisation – 1968 dans ce cas – prime sur les autres critères d’organisation.
Valentín de las Sierras, de Bruce Baillie (1931-2020), a été décrit par le critique P. Adams Sitney comme l’un de ses « poèmes héroïques sans héros ». Installé à San Francisco, Baillie tourne quelques bobines 16mm Kodachrome lors d’un voyage au Mexique. C’est à Chapala, dans l’état de Jalisco, qu’il réalise ce portrait d’un guitariste aveugle interprétant un corrido. La ballade ainsi qu’une riche bande sonore de bruits d’ambiance donnent une ampleur polyphonique aux très gros plans réalisés au téléobjectif.
Surface Tension, du cinéaste et photographe Hollis Frampton (1936-1984), présente trois séquences apparemment distinctes. Dans la première, le commissaire d’exposition Kaspar König est filmé en time lapse ; on ne peut pas entendre ses propos, alors qu’un téléphone sonne de manière insistante sur la bande son. Dans la deuxième, la voix off de König (en allemand) est montée sur une traversée de New York, également en accéléré. Dans la troisième, un paysage marin avec un poisson rouge devient le fond sur lequel vient s’inscrire la traduction anglaise du commentaire de König. Le film fonctionne comme un rébus, avec une structure cachée dont la sophistication intellectuelle s’accorde avec un certain humour.
Premier film du peintre français Jacques Monory (1934-2018), Ex- prolonge et relance sa série de toiles « Meurtres ». Montage rythmé (à la batterie : Daniel Humair) de différents types de prises de vues (jouées ou home movies, vernissages d’expositions et stock shots), Ex- est un film policier condensé. Son imagerie agressive et percutante en fait exploser la matière noire – mais c’est un filtre bleu monochrome que le peintre applique à l’ensemble du film.
N:O:T:H:I:N:G de Paul Sharits (1943-1993) : l’un des films « flicker » le plus radical de l’époque. Sharits travaille l’unité-photogramme (images de couleurs pures, ponctuées sporadiquement de quelques éléments figuratifs : une ampoule ; une chaise) afin de produire une sollicitation optique extrême. Selon les mots de l’auteur, le film est « fondé, en partie, sur le mandala tibétain des Cinq dhyani bouddhas : un voyage au centre de la conscience pure (sagesse du Dharmadhatu)/ espace et mouvement engendrés plutôt qu’illustrés/ l’énergie de temps-couleur crée une forme virtuelle/ en temps négatif, la croissance est l’inverse de la détérioration/ dédié à Stan Brakhage ».
Programme :
Bruce Baillie, Valentín de las sierras, 1968, 16mm, couleur, sonore, 9 min 43 s
Hollis Frampton, Surface Tension, 1968, 16mm, couleur, sonore, 9 min 30 s
Jacques Monory, Ex-, 1968, 16mm, couleur, sonore, 3 min 50 s
Paul Sharits, N:O:T:H:I:N:G, 1968, 16mm, couleur, sonore, 36 min
Remerciements : Miguel Armas, Dalva Deshogues (Light Cone, Paris)
* « Une histoire du cinéma » est le titre de la première exposition dédiée au film expérimental et d’avant-garde organisée par le Centre Pompidou (1976 et 1977). Reformulation des programmes de l’époque, ces séances accompagnent la parution de l’ouvrage L’Histoire d’une histoire du cinéma (Paris Expérimental/Centre Pompidou, 2023) et proposent un aperçu de la collection historique du Musée, en parcourant sa chronologie à rebours.
Free admission subject to availability of seats
Where
Institut national d'histoire de l'art (INHA), Paris
2 rue Vivienne
75 002 Paris

When
21 May 2025
Paul Sharits, N:O:T:H:I:N:G, 1968
© Estate of Paul Sharits
© Centre Pompidou, MNAM-CCI//Service de la documentation photographique du MNAM/Dist. GrandPalaisRmn