Deux femmes
1920
Deux femmes
1920
Domain | Dessin |
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Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 41 x 29,4 cm |
Acquisition | Donation Louise et Michel Leiris, 1984 |
Inventory no. | AM 1984-583 |
Detailed description
Artist |
Fernand Léger
(1881, France - 1955, France) |
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Main title | Deux femmes |
Former title | Deux femmes à la toilette |
Creation date | 1920 |
Domain | Dessin |
Techniques | Mine graphite sur papier |
Dimensions | 41 x 29,4 cm |
Inscriptions | Monogrammé et daté en bas à droite : F.L. / 20 |
Acquisition | Donation Louise et Michel Leiris, 1984 |
Collection area | Cabinet d'art graphique |
Inventory no. | AM 1984-583 |
Analysis
Au début des années 1920, Léger réintroduit le nu féminin dans sa peinture – sans pour autant renier les éléments mécaniques ou autres modules géométriques (cylindres, cercles, orthogonales) traités de préférence pendant les années précédentes. D’admirables dessins, des études de volumes aussi précisément tracés et délicatement ombrés que certains crayons d’Ingres, préparent ces tableaux et mettent en place une inattendue série d’odalisques. Souvent sans visage, parfois habillées, elles s’étendent et s’entremêlent – Léger choisit la plupart du temps de les regrouper, par deux ou par trois – au centre de plusieurs grandes compositions des années 1921 et 1922 (voir le monumental Grand Déjeuner, 1921, MOMA, New York, ou bien La Femme et l’Enfant, 1922, Kunstmuseum, Bâle). Le crayon de Deux femmes (1920) est une étude pour un tableau de dimensions plus modestes intitulé Deux femmes à la toilette, dont l’état définitif est conservé dans une collection particulière : il ne s’agit évidemment pas d’une réflexion à partir du modèle et de la ressemblance, telle que Matisse est en train de la mener à Nice dans ces mêmes années, ou que Picasso s’en saisit avec les portraits d’Olga de 1919-1920, dessinés et peints à la manière de pastiches ingresques. Léger, toujours obsédé par la beauté mécanique, travaille de son côté sur le dédoublement, l’emboîtement des formes, explore les potentialités d’abstraction que recèle l’imbrication de deux figures face à face. Indissociablement intriquées, elles dessinent ici une sorte de nœud, de noyau de forces – un noyau ovale d’où émergent à peine quelques repères reconnaissables : deux longues chevelures annelées, un visage esquissé, un pied…
On connaît par ailleurs la fascination de Léger pour les pieds et surtout pour les mains, dont il fait parfois le sujet unique d’un dessin. C’est pour lui un motif récurrent que l’entrelacement de deux mains, ou, comme dans un autre dessin de la collection, Tête et main (1920), la description infiniment délicate de la zone de contact entre un visage et la main qui le soutient, ou le caresse, on ne sait. L’effleurement du papier par le crayon restitue quasiment littéralement la sensation évoquée. Il s’agit véritablement pour Léger d’une fascination d’ordre érotique, qu’il exprime clairement quelques années plus tard, dans les lettres adressées à son amie Simone Herman. Il lui écrit ainsi le 24 mars 1932 : « Les mains ont cela de particulier qu’elles sont plus intimes. La figure est à tout le monde – on peut en être jaloux, on n’a pas inventé les gants pour la figure (si, les orientaux) – mais les mains des femmes, c’est pas pour tout le monde. Je crois vraiment que c’est l’objet des amants, la partie beaucoup plus secrète qu’on ne le pense ». Ainsi, dans ce dessin, la main sert de voile au visage, en même temps qu’elle semble en éprouver la douceur.
Mains (et ongles) figurent aussi en bonne place dans l’étude pour La Lecture, l’un des grands chefs-d’œuvre de Léger (MNAM). Comme le tableau, le dessin est daté de 1924. Il fait partie du corpus particulièrement riche (au moins une petite dizaine de dessins et six études ou versions peintes) du travail de mise au point de l’œuvre définitive. Cette version dessinée en est d’ailleurs proche, à l’exception majeure de la chevelure du personnage de droite, qui sera finalement supprimée, on le sait, malgré les objurgations du marchand de Léger, Léonce Rosenberg – le peintre racontant à ce sujet : « Mais moi vraiment avec la meilleure volonté, je ne pouvais pas mettre de cheveux à la femme. Je ne pouvais pas. À l’endroit où était sa tête, j’avais besoin d’une forme ronde et nette. » Ce dessin prouve au moins qu’il a essayé… L’autre élément absent, ou presque, du dessin est le fond abstrait, articulation de moulures et de rectangles, sur lequel se détachent les deux rondes et puissantes lectrices jumelles. Sinon, chaque détail décrivant ces belles mécaniques humaines est déjà précisément mis en place, testé dans l’espace ajusté d’une composition binaire, fondée sur la répétition, le contraste et le contrepoint : figure couchée/figure debout, figure nue/figure habillée ; deux figures, deux livres, deux mains. Le motif des trois « fleurs » est le seul mince élément de dissymétrie dans cette composition si classiquement équilibrée.
Isabelle Monod-Fontaine
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne, sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008
Events
Bibliography
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LEGER (Fernand), ROSENBERG (Léonce).- Fernand Léger, une correspondance d''affaires, Correspondances Fernand Léger - Léonce Rosenberg, 1917-1937, in Les Cahiers du Musée national d''art moderne [revue], Hors série/Archives.- Paris : éditions du Centre Pompidou, décembre 1996 (textes présentés, établis et annotés par Christian Derouet) (reprod. p. 79) . N° isbn 2-85850-830-5
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Collection Art graphique : [Catalogue de] La collection du Centre Pompidou, Musée national d''art moderne - Centre de création industrielle. - Paris : éd. Centre Pompidou, 2008 (sous la dir. d''Agnès de la Beaumelle) (cit. et reprod. coul. p. 126-127) . N° isbn 978-2-84426-371-1
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