Le génie de l'espèce III
[1939]
Le génie de l'espèce III
[1939]
Domain | Dessin |
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Techniques | Encre de Chine et gouache sur papier vélin |
Dimensions | 64,5 x 49,5 cm |
Acquisition | Achat, 1992 |
Inventory no. | AM 1992-91 |
Detailed description
Artist |
André Masson
(1896, France - 1987, France) |
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Main title | Le génie de l'espèce III |
Creation date | [1939] |
Domain | Dessin |
Techniques | Encre de Chine et gouache sur papier vélin |
Dimensions | 64,5 x 49,5 cm |
Inscriptions | Signé en bas à droite : andré Masson. Non daté |
Acquisition | Achat, 1992 |
Collection area | Cabinet d'art graphique |
Inventory no. | AM 1992-91 |
Analysis
Dans ses dessins précédant la Seconde Guerre mondiale, André Masson, réconcilié avec André Breton et nourri de ses lectures d’Héraclite, de Nietzsche, des romantiques allemands et de la phénoménologie contemporaine, mène deux grandes entreprises : la projection des discours politiques, d’une part, et scientifiques, d’autre part, sur un plan métaphysique. Pour y parvenir, il a recours, dans un style minutieusement exact, à l’exercice systématique de l’ altération , qui, selon ses propres mots, « consiste à partir d’une forme ou d’une formule donnée pour leur faire subir un capricieux ou insolent traitement ».
Son installation en Catalogne espagnole, entre 1934 et 1937, et son engagement aux côtés des armées républicaines motivent ses dessins antifascistes, où se retrouvent, sur un horizon cosmique, ses grandes obsessions : les grouillements d’insectes comme figures de la violence vitale, ou la terremère en déesse monstrueuse, s’automutilant de ses propres serres. Au-delà de la simple propagande, Masson a relié son inspiration d’alors à « la méditation sur l’horrible » des Tibétains.
Le Génie de l’espèce appartient, quant à lui, au chapitre « Visit of Humor » d’ Anatomy of my Universe – livre réunissant une série de dessins exécutés entre 1939 et 1942, publié par Curt Valentin en 1943 à New York et dédié à Jacques Lacan. Le texte français fut traduit en anglais par Meyer Schapiro. La planche est ainsi légendée : « Blason de l’époque darwinienne. Totem de la biologie triomphante. Ce dessin est le résultat d’un acquies- cement déférent encore que distant à la définition de Spencer : la vie est l’ajustement continu des rapports internes aux rapports externes (Principes de biologie, Londres, 1872 ) ». Qu’on ne s’y trompe pas : il ne s’agit pas pour Masson de célébrer l’esprit scientiste du darwinisme social (dont Herbert Spencer fut le théoricien), mais d’utiliser cette référence altérée comme tremplin pour une méditation tragique sur notre être-au-monde, par la fusion des règnes végétal, animal et humain, ainsi que par les thèmes sadiques de la décapitation et du transpercement. En 1935, de Catalogne, il écrivait déjà à Georges Bataille : « Je ne peux m’intéresser à aucune activité intellectuelle qui ne dénoncera pas d’abord l’activité inconsidérée des sciences dites exactes, […], à aucun élan révolutionnaire qui n’accordera pas à l’homme, à sa nature passionnelle, aux mystères de la vie et de la mort LA PREMIÈRE PLACE (pas au point de vue biologique en tous les cas !) ».
Rémi Labrusse
Source :
Extrait du catalogue Collection art graphique - La collection du Centre Pompidou, Musée national d'art moderne , sous la direction de Agnès de la Beaumelle, Paris, Centre Pompidou, 2008