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Allemagne années 1920, aux sources de la modernité

Pour la première fois en France, une exposition donne à voir le foisonnement artistique de l'époque de la République de Weimar. Peinture, graphisme, architecture et aussi cinéma, théâtre, littérature, musique… Riche de presque 900 œuvres, « Allemagne / Années 1920 / Nouvelle Objectivité / August Sander » est une plongée dans la Nouvelle Objectivité, mouvement majeur du 20siècle. Avec, comme fil rouge, l’œuvre d’August Sander, somme photographique sur la société allemande. Présentation, par Angela Lampe et Florian Ebner, commissaires de l'exposition.

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L’exposition « Allemagne / Années 1920 / Nouvelle Objectivité / August Sander », réunit les arts et la culture visuelle de toute une époque, celle de la République de Weimar qui fut proclamée sur les cendres de la Grande Guerre. Riche de presque 900 œuvres et documents, elle propose un format innovant par son double parcours et sa conception originale en deux volets : une exposition thématique sur un courant d’art historique, d’un côté, et un projet monographique sur l’un des plus influents photographes du 20siècle, de l’autre.


Cette manifestation sera la première vue d’ensemble sur le mouvement de la Neue Sachlichkeit (Nouvelle Objectivité) en France. Aucune exposition n’aura réuni jusque-là outre la peinture, le dessin et la photographie, l’architecture, le design, le cinéma, le théâtre, la littérature et la musique, dans un vrai esprit de pluridisciplinarité. Notre projet vise à relire la production culturelle de la République de Weimar à travers le prisme du slogan « sachlich », qui peut se traduire en français en effet par « objectif » mais aussi par « sobre », « fonctionnel », « pratique », « prosaïque », « neutre », « sans émotion » – ou définit-il toutes ces qualités en même temps ?

 

L’exposition se concentre particulièrement sur les années 1925-1929 [...] dans le but de faire ressortir la dialectique entre, d’une part, la fascination pour la rationalisation de l’époque moderne et, de l’autre, la critique d’une fonctionnalisation froide et aliénante.

 

L’exposition se concentre particulièrement sur les années 1925-1929, période durant laquelle l’Allemagne a connu une certaine stabilité économique, dans le but de faire ressortir la dialectique entre, d’une part, la fascination pour la rationalisation de l’époque moderne et, de l’autre, la critique d’une fonctionnalisation froide et aliénante. Le projet ambitionne de saisir les enjeux de cette Nouvelle Objectivité dans sa globalité, notamment pour donner à voir son actualité par les échos qu’on peut y trouver dans les débats d’aujourd’hui (la disruption opérée par les nouveaux médias, les coûts sociaux de la rationalisation capitaliste ou encore le décloisonnement des genres).

Dans un incessant va-et-vient, cette plongée dans les arts des années 1920, communique avec l’œuvre d’August Sander, chroniqueur des Hommes du XXe siècle. Pour la première fois, cet opus magnum entre en dialogue avec les artistes de son temps. Les huit grandes sections thématiques qui structurent l’exposition pluridisciplinaire – « Standardisation », « Montages », « Choses », « Persona froide », « Rationalité », « Transgressions », « Utilité », « Regard vers le bas » – sont mises, de façon inédite, en correspondance avec les sept groupes socio-culturels créés par August Sander sur la société allemande : Le Paysan, L’Artisan, La Femme, Les Corps sociaux, L’Artiste, La Grande Ville, Les Derniers Hommes.

 

Un dispositif spécifique présente non seulement les œuvres iconiques d’August Sander, mais aussi la fabrique de son regard. Tout en suivant leur propre parcours, les deux expositions se croisent et fusionnent, à trois reprises.


Un dispositif spécifique présente non seulement les œuvres iconiques d’August Sander, mais aussi la fabrique de son regard. Tout en suivant leur propre parcours, les deux expositions se croisent et fusionnent, à trois reprises. Ainsi, on découvre les échanges et relations féconds, voire les liens d’amitié, entre August Sander et le groupe des Kölner Progressive [Progressistes de Cologne], un dialogue qui permet au photographe de conceptualiser son approche. On voit combien son art du portrait résonne avec la peinture de la « Persona froide », à travers la caractérisation d’un individu par son habitus et ses attributs extérieurs, Enfin, dans la section « Regard vers le bas », on constate son intérêt pour les Types et personnages de la grande ville, une fascination qu’il partage avec nombre de ses contemporains, qu’ils soient artistes, écrivains ou intellectuels. 

Conjuguant deux expositions, avec une perspective à la fois thématique et monographique, notre projet cherche à dresser un portrait de la société allemande à la veille du nazisme. S’il s’agit avant tout d’apporter un éclairage sur les thèmes et les acteurs de cette période, un grand nombre d’événements – débats, conférences et spectacles – accompagne l’exposition sous le titre « Berlin, nos années 20 » afin d’éclairer le présent grâce à une meilleure compréhension du passé. ◼