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Introduction

Art et féminismes

Ce dossier a pour objectif d’explorer la démarche féministe des artistes femmes présentes dans la collection du Musée national d’art moderne. Le parti pris ici a été de sélectionner à la fois les plus radicales et les plus explicites des œuvres qui dénoncent l’évincement des femmes dans la société et dans l’histoire de l’art. Il s’agit pour les artistes de questionner l’identité du genre et de revisiter leur image, leur corps, l’histoire de l'art ayant souvent relégué les femmes aux rôles de muse, de séductrice ou de mère nourricière.

 

Cette prise de conscience ne date pas du 20e siècle, et si des artistes féministes sont connues dès le 18e siècle (Élisabeth Vigée Le Brun) ou au 19e siècle (Rosa Bonheur, Berthe Morisot), ce sont les années 1920 et les mouvements d’avant-gardes qui permettent l’émergence de certaines personnalités isolées comme Claude Cahun. Il faut néanmoins attendre les années 1970 pour que s’affirme un véritable courant féministe dans l’art contemporain, majoritairement sous la forme de performances. 


Dans son article publié en 1971, « Pourquoi n’y a-t-il pas eu de grands artistes femmes ? », Linda Nochlin, historienne de l’art américaine, explique que cela est lié à une organisation matérielle et structurelle de la société qui a empêché les femmes non pas de créer mais de participer pleinement à la vie artistique de leur époque. Elles n’ont pendant longtemps pas eu accès aux ateliers ou seulement en tant que modèles, seule place accordée aux femmes dans l’art pendant plusieurs siècles. Nochlin questionne aussi la notion de « grand artiste » qui renvoie à un système de distinction réservé aux hommes.
Ces quelques pistes critiques permettent de considérer à la fois les obstacles rencontrés par les femmes dans l’art et les moyens qu’elles ont trouvés pour les contourner. Dans les années 1970, elles se sont emparées des nouveaux médiums comme des espaces de liberté d’expression. La vidéo et la performance, n’étant pas encore régentées par les règles de l’art définies par les hommes, ont été des outils de création sur la question du corps et de son contrôle par une société patriarcale. 


Ce dossier invite également à une réflexion sur le rapport de l’institution qu’est le Musée national d’art moderne avec les féminismes. Les dates d’acquisition des œuvres permettent ainsi d’évaluer l’évolution de l’engagement de l’institution qui diffère selon que l’œuvre est acquise au moment de sa création ou des dizaines d’années plus tard.