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Sanja Ivekovic

Diary, 1976

 

L'œuvre

Cet ensemble de sept diptyques a été réalisé en 1976 (précisément du lundi 1er au dimanche 7 novembre 1976), soit relativement tôt dans l’œuvre de Sanja Iveković. Il concentre, tant dans sa forme que dans son contenu, les caractéristiques de la démarche de l’artiste et celles de la construction, par l’art, d’un point de vue critique féministe fort.

Chaque pièce est en effet composée de deux parties qui entrent en confrontation. D'un coté, une photographie de femme issue de la publicité, très maquillée, à la manière des stars de cinéma et dont la critique Laura Mulvey dira plus tard qu’elles répondent aux attentes du male gaze. De l’autre, un collage de cotons et kleenex sales qui ont servi durant une semaine à l’artiste à se démaquiller, pour se défaire de son apparence « publique » et retrouver son vrai visage. Reflet d’un protocole entre le rituel et la performance, Diary met en tension la femme-objet avec les oripeaux de sa beauté, sa soumission et les premiers signes de sa révolte.

 

L’image fantasmée de la femme telle que la présente la publicité contrastant avec la réalité du sort qui lui est globalement réservé, est omniprésente dans l’œuvre de Sanja Iveković. Par exemple, avec la campagne d’affichage Woman’s House (Sunglasses), elle reprend des publicités pour des lunettes de soleil sur lesquelles elle colle le récit de femmes victimes de violences domestiques.

 

Diary a été acquise par le Musée national d’art moderne trente ans après sa réalisation, en 2006.


Biographie

Née à Zagreb, à l’époque où la capitale croate était encore yougoslave, Sanja Iveković a étudié à l’Académie des Beaux-Arts de cette même ville et y a exposé pour la première fois en 1970.

Dès l’origine, son travail est radical, utilisant la vidéo, la performance, le collage comme outils d’une lutte féministe dont elle devient vite une figure majeure dans l’art de l’Europe de l’Est. En 1976, elle réalise Monument, une vidéo dans laquelle elle tourne autour d’un homme torse nu en jeans, inversant les rôles traditionnels entre l’artiste et son modèle. Comme elle l’affirmera plus tard, « Je cherche toujours le moyen le plus efficace pour faire passer le message dans un contexte donné. Je pense que l’état d’urgence qui caractérise notre époque nécessite la plus grande flexibilité de la part des artistes ; ce sont donc précisément les stratégies d’intervention (par opposition au style individuel, à l’aura, à la notion de l’artiste comme génie) qui, en tant qu’héritage féministe, sont extrêmement pertinentes dans la pratique artistique contemporaine. »

À partir de 1979, elle commence à exposer à l’étranger, notamment au Canada et aux États-Unis où son œuvre est reconnue. Sanja Iveković vit toujours à Zagreb où elle a fondé en 1994 Electra, un centre d’art vidéo féministe. 


Pour aller plus loin


Link : Sanja Ivekovic et Maja Bajevic

Captation d'une rencontre organisée par le Centre Pompidou en novembre 2014

animée par Elisabeth Leibovici

Durée : 2h