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VALIE EXPORT

Aktionshose: Genitalpanik, 1969

 

VALIE EXPORT
Aktionshose : Genitalpanik
(Action pantalon : Panique génitale), 1969
Tirage offset sur papier, 69,8 x 49,8 cm. Dimensions de chaque affiche, hors cadre
© Adagp, Paris
Philippe Migeat - Centre Pompidou, MNAM-CCI /Dist. RMN-GP

L'œuvre

Parmi les œuvres les plus célèbres de VALIE EXPORT figure cet ensemble de six affiches originales acheté par le Musée national d’art moderne en 2008. Ces six reproductions de la même photographie avec des variations de trames et de tirage ont été réalisées dans le prolongement d’une performance réalisée en 1968 à Munich dans un cinéma d’art et d’essai lors d’un festival réunissant des réalisateurs de cinéma expérimental.
« Je portais un pull et un pantalon qui laissait voir mon sexe. J’étais armée d’une mitrailleuse. Entre deux films, je disais aux spectateurs qu’ils étaient venus dans ce cinéma-là pour voir des films sexuels, mais que, maintenant, je mettais à leur disposition de vraies parties génitales et qu’ils pouvaient en faire ce qu’ils voulaient. Je suis passée lentement dans chaque rang, face aux gens. Je ne me déplaçais pas de façon érotique. Tout en marchant le long d’un rang, je dirigeais l’arme sur les spectateurs du rang de derrière. J’avais peur et je n’avais pas la moindre idée de ce que les gens allaient faire. À mesure que je passais d’un rang à l’autre, les spectateurs de chaque rang se levaient lentement et quittaient la salle. Comme ils n’étaient plus dans le contexte du film, cela devenait complètement différent pour eux d’établir un rapport avec ce symbole érotique particulier. »

 

En somme, l’action opère une critique sociale radicale tout en relevant du champ de l’expanded cinema (cinéma élargi) dans lequel le corps de l'artiste active le contexte de visionnage en direct et révèle ainsi la différence d’attitude des spectateurs face aux images projetées et face à la réalité. Quant aux affiches qui la consacre, elles sont comme l’annonce a posteriori d’un événement. On y voit l’artiste les cheveux en bataille, mitraillette à la main, dans une posture déterminée à la Calamity Jane, à l’instar des activistes de l’époque, si ce n’est que ses jambes écartées laissent apparaître son sexe dans le fameux triangle découpé de son jeans. 


Biographie

Originaire de Linz (Autriche), de son vrai nom Waltraud Lehner, celle qui prend le nom de VALIE EXPORT en 1967 (du nom d’une marque de cigarette) étudie d’abord le design textile à Vienne où elle rencontre les acteurs de la scène cinématographique et artistique. Elle y découvre les actionnistes viennois, un groupe d’artistes qui abandonnent la peinture gestuelle pour développer la libération de leurs pulsions à travers des performances radicales où leur corps est envisagé comme un lieu de résistance politique.

VALIE EXPORT critique leur rapport au masculin, qui reste dominant et déployé dans l’espace social, tandis qu’elle dénonce le corps féminin contraint par les espaces domestiques, et confinés dans un rôle social déterminé par la société : la mère, l’amante ou la prostituée. De ce point de vue, son œuvre peut être considérée comme un actionnisme féministe. En effet, elle est l’une des premières artistes à thématiser le male gaze – plus tard théorisé par Laura Mulvey – et à travailler avec son corps dans sa dimension sociale et politique, en le mettant en scène dans l’espace public. Les mises en situation intitulées Body configurations ont donné lieu à une série de photographies datées de 1972 à 1976.  Au cours de ces performances, elle pose dans les rues de Vienne en jouant avec l’architecture de monuments emblématiques ou dans des lieux plus secrets, cours intérieures, impasses, cages d’escalier, puis dans la nature. Elle s’immisce là où l’existant lui permet de s’installer, momentanément et dans l’inconfort de contorsions.


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