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Le Métafizyx

Août 1950

Jean Dubuffet

Ce corps démesuré surmonté d’une petite tête de profil prend ici l’allure d’un crâne couronné de cheveux semblable à une perruque. La créature paraît exhiber l’intérieur de son ventre avec ses petites mains gravées de chaque côté du torse. La couleur frappe d’abord faisant massivement « corps » avec la matière picturale, lourde, épaisse. Cette couleur évoque celle de l’or et confère à la silhouette féminine un caractère d’idole sacrée.

Pourtant c’est à une désacralisation de la représentation du nu féminin que l’on assiste ici. La figure s’étale immense, prenant largement possession de l’espace. Dubuffet se plaît à travailler une matière picturale épaisse qu’il triture, incise et lacère, comme dans les séries précédentes de Paysages et Portraits de la fin des années 1940. Appel à la dimension mortelle ; femme rime ici avec mère, mater, materia. Les écrivains au 20e siècle ont largement insisté sur cette dimension de la femme : « Cette mère qui nous donne la vie mais pas l’infini » de Samuel Beckett, ou alors « Ces femelles qui nous gâchent tout l’infini » de Louis-Ferdinand Céline. 


Le titre au masculin intrigue par un curieux néologisme, formé par le mot métaphysique, le mot sphinx qui se lit entre les syllabes, et autre chose encore. Avec ironie, Dubuffet change les consonnes et déstabilise toute lecture univoque de l’œuvre par son titreMétafizyx, terme imaginaire révèle sa quête d’un corps féminin universel à la chair tout à la fois jubilatoire et périssable, contraire au traitement érotisé de celui de l’histoire de l’art académique. 


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Dans la collection du Centre Pompidou :

Portraits de la série « Women » de Willem de Kooning