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Piet Mondrian

1872, Amersfoort (Pays-Bas) – 1944, New York (États-Unis)

Pionnier de l'art abstrait

Cette toile, bien que tardive par rapport au passage de Mondrian à l'abstraction qui s’effectue autour de 1914, illustre le caractère singulier de sa démarche. Motivé par l’idée que la nature est régie par une structure immanente, Mondrian cherche toute sa vie durant à exhiber un réseau de forces organisatrices et primordiales dégagées des irrégularités propres à l'existence. Sa peinture consiste à les étudier de manière épurée, aboutissant à une abstraction géométrique radicale, dont le vocabulaire est en place dès 1917.

 

Dans Composition II de 1937, il poursuit son étude des deux grandes tensions contradictoires, horizontale et verticale, qui selon lui sous-tendent le monde, en orientant de plus en plus sa recherche vers l’idée d’un équilibre dynamique. Dans ce but, il multiplie les lignes noires entrecroisées et utilise les plans colorés dans un système de contrepoids.
Les intersections des lignes, ainsi que les parties colorées peintes de manière uniforme, affirment la planéité de la toile et suggèrent une impression de stabilité. Mais grâce aux variations de largeur des lignes, des effets visuels d'oscillation creusent l'espace blanc et animent la toile d'une illusion de mouvement, effets renforcés par le rejet des plans rouge et bleu aux extrémités de la surface.

Mondrian, par la suite, accentue l’effet dynamique de ses toiles en substituant aux lignes noires des lignes colorées, ce qui leur procure une vitalité éclatante.


Mondrian réalise cette toile, emblématique de sa dernière période, alors qu’il est en exil à New York. En découvrant cette ville, et en particulier son image nocturne ponctuée par la lumière des enseignes et des phares de voiture qui soulignent son plan orthogonal, Mondrian rencontre un paysage qui donne raison à sa peinture.

 

New York est comme une confirmation de sa thèse selon laquelle l’essence de l’univers se réduit à une structure géométrique. Mais ce modèle urbain l’entraîne à penser la structure comme un mouvement perpétuel, ce qu’il exprime en travaillant sur les couleurs de son réseau de lignes. Dans New York City, les lignes bleues, rouges et jaunes s’enchevêtrent les unes dans les autres, passant tantôt dessus, tantôt dessous, selon une logique dynamique.

Cette nouvelle écriture aboutit, dans les toutes dernières années de sa vie, à des grilles et à des lignes composées d’une multiplicité de petits carrés de couleurs, circulant sur toute la surface de la toile dans un rythme effréné inspiré du jazz et du boogie-woogie. Mondrian annonce ainsi l’avènement d’un art cinétique.


Biographie

Très tôt, à l’exemple de l’un de ses oncles, Piet Mondrian se veut peintre et uniquement peintre, malgré le désaccord de son père. Pour imposer sa vocation et financer ses études, il accepte d’enseigner le dessin dans des écoles primaires et secondaires.
En 1893, il s'inscrit aux cours de peinture de l'Académie de Beaux-arts d'Amsterdam et peint principalement des paysages. Mais ces pratiques ne satisfont guère sa curiosité et il se lance dans une quête, qui n’aboutira que plus de vingt ans après, sur ce que doit être la peinture. Durant cette grande période de tentatives et d’incertitudes, Mondrian essaie tous les styles picturaux classiques et modernes, du réalisme le plus parfait au fauvisme qu’il emprunte à son compatriote installé à Paris, Kees van Dongen. Mais il passe aussi par le symbolisme, l’impressionnisme, le pointillisme, tout en réalisant de nombreuses peintures ésotériques qui illustrent des préceptes tirés de la théosophie, à laquelle Mondrian adhère à partir de 1900.

 

Il s’installe en 1912 à Paris où il découvre les recherches récentes de peintres cubistes, lesquels, s'interrogeant sur la traduction de l'espace dans la surface d'une toile, expérimentent les limites de l’abstraction. Mondrian s’engouffre dans cette voie en travaillant sur les réseaux de lignes noires qui, chez les cubistes, permettaient de cimenter les diverses facettes de la réalité.

En 1914, tandis qu'il est en vacances dans la campagne hollandaise, à Domburg, la guerre le surprend et le contraint à rester dans son pays. Il met alors à profit les leçons apprises à Paris et aboutit en 1917 à son mode de composition qui donne à voir, à la manière d’une formule mathématique, ce qui selon lui constitue l’essence des choses : une peinture de lignes orthogonales sur fond blanc, avec des couleurs primaires qui remplissent certaines sections.
Jusqu’à sa mort en 1944, il travaille à partir de ce vocabulaire qu’il désigne sous le terme de néo-plasticisme.


Pour aller plus loin

Podcast New York City

Série « Les chefs-d'œuvre du Centre Pompidou », 2020
Durée : 9'


Dans la collection du Musée national d'art moderne

Œuvres de Piet Mondrian