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La Bouteille de vieux marc

[printemps 1913]

Pablo Picasso

Cette composition appartient à la période du cubisme synthétique (1912-1914) au cours de laquelle Picasso et Braque reviennent à une simplification des formes ainsi qu’à une référence explicite aux objets. Grâce à la page de journal qui y est collée, on peut la dater d’un séjour à Céret au printemps 1913.

 

Ayant expérimenté le procédé des papiers collés depuis 1912, notamment avec sa Nature morte à la chaise cannée où figure un morceau de toile cirée, Picasso précise ici sa recherche sur les différents niveaux de représentation de l’espace pictural. Toute une gradation est proposée, du plus réel au plus allusif, avec le vrai journal assumant son propre rôle, puis le véritable papier peint qui, lui, figure une nappe, jusqu’à la bouteille, stylisée à l’extrême et identifiable grâce à l’inscription « vieux marc ».

 

Dans un réseau de lignes tracées au fusain, suggérant le contour de la table, le goulot et le corps de la bouteille, le profil du verre, les morceaux de papiers interviennent aussi comme des indices pour guider l’interprétation. Par exemple, le morceau de papier peint, qui parachève la représentation du verre, identique à celui qui recouvre la table, attire l’attention sur la transparence du verre, et ainsi, sur l’ambivalence de notre expérience visuelle.

 

Les papiers collés, réalisés après une période où la peinture cubiste a abouti à un système de codes à la limite de l’abstraction, opèrent donc un retour au réel qui prolonge le questionnement de Picasso sur la perception.


Pour aller plus loin

Autour des papiers collés :

Georges Braque, Coupe de fruit et verre, automne 1913 (Metropolitan Museum of Art, New York)

Pablo Picasso, Nature morte à la chaise cannée, printemps 1912 (Musée national Picasso-Paris). Fiche œuvre (PDF)