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Le Centre Pompidou &… François Halard

Figure majeure de la photographie contemporaine, François Halard (né en 1961) s’est imposé dès les années 1980 en révélant l’intimité des ateliers et des lieux de vie de créateurs mythiques. Alors que s’ouvre bientôt sa prochaine exposition, rencontre avec un photographe qui n’a cessé de nourrir sa culture visuelle au Centre Pompidou.

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Au niveau 2 de la Bibliothèque du Centre Pompidou ne subsistent que de longs rayonnages, débarrassés de leurs livres. La moquette élimée trahit la forte fréquentation du lieu depuis son ouverture au public en 1977. Pour le photographe François Halard, ce décor fantomatique, baigné d’une lumière falote, rappelle spontanément ceux de l’artiste Thomas Demand (né en 1964).

Après sa formation aux arts décoratifs, à Paris, François Halard s’installe à New York dans les années 1980 où il travaille pour différents magazines comme Vogue US, Vanity Fair, GQ, House & Garden… Cela lui permet non seulement d’accéder aux résidences ou aux intérieurs de créateurs, mais surtout aux ateliers d’artistes parmi les plus célèbres de leur génération, comme Cy Twombly, Robert Rauschenberg, Louise Bourgeois. Il fait ainsi dialoguer artistes, œuvres et cadres de vie, mettant en lumière toutes les coulisses de la création dans des clichés minutieusement composés témoignant d'un souci du menu détail.

 

François Halard fait ainsi dialoguer artistes, œuvres et cadres de vie, mettant en lumière toutes les coulisses de la création dans des clichés minutieusement composés témoignant d'un souci du menu détail.

 

Revendiquant une pratique confinant à l’obsession, l’homme est capable d’exposer deux caisses de polaroid en deux heures, comme à Giverny récemment où il célébrait son anniversaire ; « L’appareil photo, ou la main pour un peintre, est vraiment la continuité de son instinct, de son espace », dit-il. De ces instantanés, qu’il retravaille avec de la peinture, de la cire ou d’autres matériaux, il tire de nouvelles séries, dont une partie présentée à l'occasion d'une exposition pour Paris Photo : « Soupirs de nénuphars, reflets de ciels, fleurs fantomatiques ou sculpturales, eaux dormantes et brumes oniriques […] Une hybridation entre la mimèsis de la photographie et le lyrisme de la peinture », écrit Vincent Huguet. Loin, bien loin de la photographie d’architecture ou d’architecture d’intérieur qui l’a rendu célèbre. Rencontre.


François Halard — Le Centre Pompidou, c’est un bâtiment qui a très bien vieilli. D’ailleurs, c’est le premier bâtiment que j’ai pris en photo. Il a pris une patine, même s’il a été malmené à ses débuts. J’aime le charme de ses tuyaux. Il se situe quelque part entre John Chamberlain et Robert Rauschenberg, il a un côté sculptural.

 

Le Centre Pompidou, c’est le premier bâtiment que j’ai pris en photo.

François Halard

 

J’allais beaucoup au Centre Pompidou à la fin des années 1970, lorsque j’étais étudiant. J’ai été vraiment très influencé par les grandes expositions-monuments, « Paris–New York » (1977), « Paris–Berlin » (1978), « Paris–Moscou » (1979), « Paris–Paris » (1981). J’ai tous les catalogues, et c’était formidable parce que c’étaient vraiment des outils de recherche iconographiques où tu pouvais lire, t’instruire. De vrais pavés où l’on découvrait des choses inédites, pas des choses qu’on avait déjà vues ou revues. Ça offrait une véritable plongée dans l’histoire de l’art du début du 20e siècle. C’était vraiment une chose très marquante pour moi.

 

Puis il y a eu des expositions consacrées à Balthus, à Pablo Picasso évidemment, ou encore à Cy Twombly, dans laquelle étaient présentés mes portraits de lui ; une transition entre mon travail et ce lieu. À l’époque, j’avais un contrat d’exclusivité pour le Vogue américain et je faisais beaucoup de photographies d’ateliers d’artistes. J’ai pu rencontrer Jean-Michel Basquiat, Andy Warhol, Julian Schnabel…. Il n’y a rien de tel que d’aller dans l’intimité du studio d’un artiste pour comprendre sa manière de travailler tout en enrichissant sa propre pratique. J’aimais l’énergie du New York des années 1980-90, c’était terriblement excitant.

 

Rien de tel que d’aller dans l’intimité du studio d’un artiste pour comprendre sa manière de travailler tout en enrichissant sa propre pratique.

François Halard

 

Je trouve qu’on retrouve cet esprit dans le Paris d’aujourd’hui. D’ailleurs, célébrer la fermeture de Beaubourg au cours d’un grand week-end en musique avec Because Musique, c’est un signe. Je ne suis pas certain que ç’aurait été possibe il y a quelques années… ◼