Homme et Femme
[1928 - 1929]

Homme et Femme
[1928 - 1929]
Domaine | Sculpture |
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Technique | Bronze |
Dimensions | 40 x 40 x 16,5 cm |
Acquisition | Dation, 1984 |
N° d'inventaire | AM 1984-355 |
Informations détaillées
Artiste |
Alberto Giacometti
(1901, Suisse - 1966, Suisse) |
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Titre principal | Homme et Femme |
Titre attribué | Le couple |
Date de création | [1928 - 1929] |
Domaine | Sculpture |
Technique | Bronze |
Dimensions | 40 x 40 x 16,5 cm |
Tirage | Exemplaire unique d'après un plâtre disparu |
Acquisition | Dation, 1984 |
Secteur de collection | Arts Plastiques - Moderne |
N° d'inventaire | AM 1984-355 |
Analyse
Véritable aboutissement plastique des Danseurs , le couple que forme Homme et Femme , dont n’existe que cette seule version en bronze à tirage unique (le plâtre, connu par deux photographies de Marc Vaux, a dû être aussitôt détruit), montre un nouveau travail d’évidement de la masse compacte : expliquant à son marchand new-yorkais Pierre Matisse son désir, qui deviendra obsessionnel, de traduire « une espèce de squelette dans l’espace », Giacometti en arrive à concevoir une « construction transparente », qui le mènera, avant celle des « Cages » en 1930, à la fabrication des « Grilles », analogues aux « Constructions » ouvertes de Lipchitz de 1927-1928, et à celles de Picasso pour le Monument à Guillaume Apollinaire (1928-1929, Paris, Musée Picasso). Mais si les deux figures sont réduites à l’état d’épures linéaires géométriques, elles sont traduites par Giacometti en termes de vecteurs actifs : arcs, obliques, zigzags disent le « côté aigu des choses », qui est, dans son esprit, la tension violente de la distance entre deux êtres, celle du désir sexuel. Se conjuguent ici, en deux arcs opposés à polarités contraires, deux figures réduites à leurs attributs sexuels primaires : tandis que l’homme bande et pointe sa flèche (aiguë, précise, elle s’arrête à quelques millimètres du sexe féminin), la femme qui lui fait face renverse la coque concave de son ventre, au centre duquel s’érige sa bouche / vulve, et se plie en un zigzag nerveux pour la recevoir (ou l’éviter ?). C’est là le schème visuel, le pictogramme de l’acte sexuel dans toute son ambiguïté (rejet et acceptation du coït) que Giacometti livre ici, donnant à voir non seulement l’ambivalence du fonctionnement du désir – son mécanisme de réversibilité qui deviendra dans Pointe à l’œil réversibilité du regard – mais aussi sa nature inconsciente et pleinement convulsive.
Homme et Femme peut ainsi être considéré comme augural de la production dite « surréaliste » de Giacometti : il fut exposé à ce titre à la galerie Pierre Colle en 1932 (4-17 mai), et photographié par Boiffard pour la revue Transition (n o 21, mars 1932). Les premiers, cependant, à saluer les « Grilles » de Giacometti sont les dissidents du groupe surréaliste, les habitués de la rue Blomet autour d’André Masson et de Joan Miró : Georges Bataille, Carl Einstein et Michel Leiris. Dans l’article qu’il consacre à Giacometti ( Documents , n o 4, septembre 1929), le premier à paraître sur le sculpteur, Leiris voit en ses œuvres moins des objets oniriques et fantasmatiques que de « véritables fétiches », des « pétrifications » concrètes de perceptions instinctives, subjectives : en plaçant, pour une photographie de Marc Vaux, Homme et Femme au centre d’un cercle de trois « Plaques », il en souligne le caractère sacré latent, la violente dramaturgie.
Agnès de la Beaumelle
Source :
Collection art moderne - La collection du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne , sous la direction de Brigitte Leal, Paris, Centre Pompidou, 2007