Artiste/personnalité
Joan Mitchell
Peintre

Joan Mitchell
Peintre
Nationalité américaine
Naissance : 1925, Chicago (Illinois, États-Unis)
Décès : 1992, Paris (France)
© Estate of Joan Mitchell
Biographie
Joan Mitchell invente à l’échelle d’une carrière s’étendant sur près de quarante ans une peinture singulière : abstraite mais inspirée par ses paysages familiers, gestuelle et lumineuse. Elle fait partie du cercle restreint des expressionnistes abstraits, mouvement artistique apparu aux États-Unis à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Elle fait aussi partie des rares femmes peintres à être devenues célèbres de leur vivant. En témoigne la grande rétrospective organisée par le Musée national d’art moderne en 1982, la première à être consacrée à une artiste femme américaine. Ses toiles monumentales, travaillées avec vigueur et à la couleur pure, l’inscrivent dans la tradition des grands paysagistes comme Claude Monet, Henri Matisse ou surtout Vincent Van Gogh qu’elle admirait plus que tout.
Née en 1925 à Chicago au sein d’une famille de la haute bourgeoisie passionnée par les arts - son père, dermatologue célèbre, pratique la peinture en amateur, et sa mère, héritière d’un empire industriel, est une poétesse reconnue - Joan Mitchell étudie à l’Art Institute de Chicago. Elle en sort diplômée en 1947, dans une Amérique qui se remet tout juste du conflit mondial et déborde d’énergie artistique. Après un an passé en France grâce à une bourse de fin d’études, elle s’installe à New York en 1949. Elle devient alors membre active de l’école de New York, un groupe informel de peintres, poètes, musiciens et danseurs inspirés par le surréalisme européen. Elle rencontre les principaux chefs de file de l’expressionnisme abstrait, dont font partie Jackson Pollock et Willem de Kooning, avec qui elle expose dès 1951. Ses peintures s’inscrivent alors pleinement dans ce mouvement : coups de pinceaux vigoureux et coulures recouvrent l’intégralité de la surface de la toile, sans distinction de figure ou de fond (Sans titre, 1954).
Dans les années 1950, elle met en place le vocabulaire de sa pratique de la peinture à l’huile. À la limite entre abstraction et figuration, celle-ci est un travail de mémoire. Chaque toile est une tentative de faire réémerger des sensations visuelles liées à une expérience remémorée, et qui convoquent toute une chaîne de souvenirs. « Je peins des souvenirs de paysages que j'emporte avec moi, ainsi que les souvenirs des sentiments qu'ils m'ont inspirés, qui sont bien sûr transformés. » Se faire le miroir de la nature lui semblait impossible : elle cherchait plutôt à peindre « ce que cela lui laissait ».
À partir de 1955, elle partage son temps entre les États-Unis et la France avant de s’installer définitivement à Paris en 1959. Elle peint alors souvent de nuit, à la lumière électrique, à partir de sensations accumulées pendant la journée. Dans les années 1960, le diptyque et le polyptyque font leur apparition dans son œuvre, ouvrant sur une fragmentation des points de vue (The sky is blue, the grass is green, 1972). En 1968, elle emménage à Vétheuil, un petit village de Normandie, dans une maison surplombant la Seine. Le geste de Mitchell se fait alors plus mesuré, plus calme, les champs colorés émergeant d’un fond blanc évoquant une sensation d’espace en apesanteur (Chasse interdite, 1973). Engagée envers la génération émergente, elle accueille à Vétheuil de nombreux jeunes artistes et écrivains. C’est aussi dans ce cadre idyllique que cet esprit tempétueux et sans compromis s’isole de plus en plus du monde. Elle décède en 1992, laissant une œuvre violente et exaltée, toujours inspirée par le bonheur ou la souffrance que lui inspirait sa contemplation de la nature.