Exposition / Musée
Haegue Yang / Lingering Nous
6 juil. - 5 sept. 2016
L'événement est terminé
Le Centre Pompidou présente une production monumentale inédite de l’artiste coréenne Haegue Yang. Le Forum accueille Lingering Nous, une œuvre crée pour le Centre Pompidou, déployée sur la hauteur des trois niveaux de ce vaste espace situé au cœur du bâtiment. L’installation est librement accessible à tous jusqu’au 5 septembre 2016.
Traversant plusieurs médiums, du collage à la performance, Haegue Yang interroge les qualités plastiques et émotionnelles des objets du quotidien à travers des compositions abstraites où, dissociés de leurs contextes, ils se trouvent libérés de leurs fonctions premières.
Suspendue dans la cavité du Forum, Lingering Nous est une installation composée de stores vénitiens - matériau de prédilection d’Haegue Yang. De taille monumentale, constituée d’environ 166 éléments roses et verts iridescents, l’œuvre a pour particularité de comporter de nombreux stores montés en diagonale. Lingering Nous est accompagnée de quatre essais vidéo au niveau -1 du Forum, Video Trilogy (2004-2006) et Doubles and Halves – Events with Nameless Neighbors (2009). Ancrés dans les réalités intimes d’une vie contemporaine fugace, leurs récits confèrent une voix à l’installation muette, permettant tout à la fois d’apprécier la richesse de l’œuvre d’Haegue Yang.
Quand
11h - 21h, tous les jours sauf mardis
Où
Entretien avec l'artiste
Nicolas Liucci-Goutnikov – Depuis ces dix dernières années, tu proposes des installations faites de stores, où la lumière artificielle, le mouvement et parfois les odeurs entrent en jeu. Cette pratique te conduit-elle à produire des « expériences » plutôt que des « objets » ?
Haegue Yang – Oui et non, puisque les stores n’occupent pas l’espace comme des objets ordinaires. Ce sont des objets qui articulent l’espace en vertu de leur puissance obscure. Dans mes premiers travaux, comme Series of Vulnerable Arrangements – Blind Room (2006), les stores constituent simplement des zones d’expérience sensibles, du courant d’air froid provenant du climatiseur suspendu à la chaleur émise par les radiateurs infrarouges autoportants. Muette et pourtant riche en effets, Blind Room contient également la voix enregistrée dans les trois « essais » vidéographiques de Trilogy. Cette voix habite le même espace. Yearning Melancholy Red (2008) m’a permis de mettre à l’épreuve mes découvertes quant à l’« obliquité du store », explorée dans Blind Room. Les stores s’y déploient en une expression spatiale plus évidente. Ils racontent aussi une histoire à travers leur forme, leur couleur et le dialogue contrasté avec une lumière rouge en mouvement. Autour des structures de stores, trois paires de radiateurs et de ventilateurs opposées sont juxtaposées. Elles intensifient l’expérience des sens.
NLG – La plupart de tes installations sont faites d’objets ménagers, privés de leur fonction. Quelle est ta relation à ces objets ?
HY ‑ Les matériaux sont doués d’une puissance magique. Je les envisage dans toute leur potentialité, une potentialité qui ne s’actualise qu’à travers la lutte. Toutes ces années passées à travailler avec acharnement les stores ont, d’une certaine manière, prouvé que cette lutte n’était pas vaine : elle leur aura permis de se libérer de leur ancrage trivial au quotidien.
NLG – À quelle problématique as-tu été confrontée pour cette installation au Centre Pompidou ?
HY – Je me la suis imposée à moi-même, envisageant de revenir à une forme antérieure de la série de mes œuvres intitulées Sol LeWitt Upside Down, débutée en 2014. Je souhaitais me libérer du fort désir que j’éprouvais alors : une installation de stores qui citerait explicitement les structures modulaires de Sol LeWitt. Mais j’ai fini par retourner à ce dont j’avais essayé de me défaire, achevant un cycle de construction conceptuelle : de l’« apprendre » au « désapprendre ».
NLG – Tu as conçu l’installation pour le Forum du Centre Pompidou en la rendant adaptable aux galeries d’exposition. Comment y es-tu parvenue ?
HY – L’installation repose sur une grille dotée de sa propre géométrie, offrant une moindre résistance aux transformations. En tant que telle, elle peut être adaptée à des espaces de différents formats, donnant à cette œuvre la possibilité d’une existence aventureuse !
Nicolas Liucci-Goutnikov
Source :
in Code Couleur, n°25, mai-août 2015, pp. 36-37
