Jafar Panahi : Exposition

En 2010, le réalisateur iranien Jafar Panahi était condamné à six années de prison assorties d’une interdiction de filmer de vingt ans. Accusé de « propagande contre le régime », il ne peut plus sortir de son pays ni donner d’entretiens à la presse. Il risque chaque matin de voir débarquer les Pasdaran (corps des Gardiens de la révolution islamique) pour lui signifier son incarcération immédiate. Il ne peut, de surcroît, exercer sa passion de cinéaste, soit ce pourquoi il a le sentiment d’être au monde. Panahi aurait pu arrêter de tourner, changer d’activité ou choisir l’exil. Mais il a décidé de braver l’interdit en continuant à faire des films coûte que coûte – Ceci n’est pas un film (2011), Pardé (2013), Taxi Téhéran (2015) –, puis en acceptant de répondre à la commande du Centre Pompidou de réaliser le court métrage Où en êtes-vous, Jafar Panahi ? Dans chacun de ses films, il interroge la privation de la liberté, l’apprivoise et la transcende. À un cinéma « interdit », il répond en somme par un cinéma « insoumis ». Quand il ne réalise pas des films clandestins et lorsqu’il ne rêve pas à ceux qu’il ne peut pas faire, Panahi s’adonne à la photographie. Depuis 2013, il fixe principalement les nuages. Ces derniers l’intéressent parce qu’ils constituent le prototype même de ce qui se dérobe. Le ciel est également pour lui une incomparable surface de projection. Il y sonde son désir le plus ardent. Délicats, nomades et totalement désentravés, les nuages sont pour lui la forme la plus exacte de la liberté.