Ilya Kabakov

Inédite et spécialement conçue pour le Centre Georges Pompidou, l'installation C'est ici que nous vivons est sans doute la plus vaste des soixante dix installations réalisées à ce jour par l'artiste russe Ilya Kabakov (né en 1933 en Union soviétique). Elle occupe en effet les 1 800 m2 des deux niveaux du Forum.

L'ensemble de l'installation évoque le chantier d'un énorme bâtiment, un magnifique Palais du Futur, dont les quelques colonnes déjà érigées sont entourées d'échafaudages. Parcourant ce chantier, jonché de divers matériaux de construction - sable, planches, fil de fer, etc. - le visiteur s'aperçoit que les travaux sont arrêtés depuis longtemps déjà, que tout y est laissé à l'abandon, échafaudages et matériaux ne formant qu'un amas de déchets. En revanche, une vie s'est organisée dans les différentes baraques d'ouvriers qui entourent le chantier : en circulant d'un espace à l'autre, le visiteur découvre un univers complexe, comprenant un foyer, une salle de réunions, des vestiaires et divers appartements, le tout bien aménagé et parfaitement habitable. Ce qui semblait devoir n'être que provisoire (les baraques d'ouvriers) s'est avéré finalement le lieu d'habitation de plusieurs générations.

A la manière des matriochkas, ces poupées russes gigognes, cette installation est constituée par un ensemble de dix neuf installations indépendantes, toutes inédites, dont chacune a sa propre histoire et sa propre structure.

On peut souligner la présence, au sous-sol, parmi d'autres colonnes et matériaux de construction, d'une installation musicale intitulée Trois chants dédiés au pays natal, elle-même constituée de trois installations comprenant chacune une peinture de grand format réalisée par Kabakov à New York dans le style réaliste-socialiste. Des chansons russes des années 1930-50 sur les thèmes de la terre natale, l'enthousiasme des chantiers soviétiques, l'amour et l'amitié, sont diffusées. Le spectateur se trouve ainsi transporté dans un monde qui l'envahit totalement.

L'installation C'est ici que nous vivons, sollicitant à la fois la vue et l'ouïe, la mémoire et l'imaginaire du spectateur, appartient à ce type de travaux qu'Ilya Kabakov développe depuis 1988 - sans l'avoir cependant étendu à une telle échelle - et qu'il qualifie "d'installation totale".