Hilma af Klint
1862 – 1946, Stockholm (Suède)
Pionnière de l'art abstrait
Hilma af Klint partage un intérêt pour le spirituel avec les autres pionniers de l'art abstrait, notamment Vassily Kandinsky, Kasimir Malévitch, Piet Mondrian et František Kupka. Tous souhaitent dépasser les restrictions du monde physique. Leur attirance commune pour la théosophie n’a rien de surprenant car celle-ci propose une alternative attrayante au carcan de l’art académique. Plutôt que représenter une simple impression visuelle, l’art abstrait ouvre un champ d’expression radicalement nouveau, dans lequel ces artistes recherchent une nouvelle voie spirituelle.
Monumentale, The Large Figure Paintings, No 5, Group III appartient au cycle des « Peintures pour le Temple » réalisé en 1907 et 1908. Elle est le fruit d’une expérience médiumnique c’est-à-dire automatique. Hilma af Klint affirme ne pas être à l’origine de cette image, mais l’avoir peinte sous l’influence d’un esprit, l’ange Amiel, convoqué lors de séances de spiritisme.
Composé de formes tourbillonnantes contenues dans un cercle, l’ensemble s’équilibre grâce à des lignes blanches qui se croisent de chaque côté de la composition et sont réunies par un cercle central. Cette œuvre aux couleurs vives présente des formes symboliques semblables à des pétales, des ovaires, des fleurs ou des spirales palpitantes au sein d’une constellation, libérée des contraintes de lieu et de temps. Ici, la couleur bleue se rapporte à la femme, et le jaune à l’homme.
Fidèle au principe de la théosophie, Klint recherche, à travers son art, une unité préexistant à l’origine du monde, qui aurait été brisée. L’existence humaine serait la quête de la réunion des forces opposées qui auraient été déchirées au début de la création. Hilma af Klint est convaincue que la réalité ne se limite pas au monde physique. Parallèlement à la dimension matérielle, il existe, selon elle, un royaume intérieur dont le contenu est aussi vrai et réel que celui du monde extérieur.
Biographie
Considérée aujourd’hui comme l’artiste à l’origine de l’abstraction en Europe, Hilma af Klint est née en 1862 (4 ans avant Vassily Kandinsky). Sa famille est puritaine et très croyante même si par ailleurs très impliquée dans l’ingénierie, les sciences, les mathématiques.
Hilma af Klint suit une formation artistique à Stockholm en 1882, où elle acquiert la maîtrise du paysage et du portrait.
Marquée par le décès de sa sœur cadette à l’âge de 10 ans, elle s’intéresse au spiritisme et à l’occulte, recherchant le maintien du contact avec les défunts. Très en vogue au début du 20e siècle, le spiritisme et les sciences occultes sont contemporains de l’invention du télégraphe, outil de communication à distance.
Hilma af Klint fonde une communauté d'artistes femmes appelée « Fem » (Les Cinq), avec lesquelles elle s’adonne à des séances de dessins automatiques dirigés par des esprits angéliques. Polygraphe, elle produit plus de 200 carnets où l’on trouve dès 1887 tout son vocabulaire d’éléments abstraits.
En 1907, soit quelque cinq ans avant la date retenue comme la naissance historique de l’abstraction (1912), l’artiste suédoise produit une série de peintures monumentales, Peintures pour le Temple. Composées de disques et formes florales empruntées au Jugendstyl, sur un fond de couleurs acidulées novatrices, elles sont destinées à la décoration d’un temple qui ne verra jamais le jour. Restées secrètes, ses peintures ne sont montrées qu’à des initiés. Parallèlement, Af Klint poursuit une carrière de peintre académique pour subvenir à ses besoins et expose des paysages et des portraits à Malmö.
Sa carrière alterne entre un art ésotérique aux formes abstraites et une peinture de genre et cela explique, sans doute, que l‘histoire de l’art ait oublié de la considérer comme une des pionnières de l’abstraction, alors que son intérêt pour la théosophie est antérieur à celui de Piet Mondrian.
Convaincue que son art ne pourrait pas être compris par ses contemporains, elle lègue toute sa production à son neveu, sous la condition de n'être exposée que 20 ans après sa mort. Mais ce n’est qu’en 1986, soit 40 ans après sa disparition, que l’exposition « The Spiritual in Art: Abstract painting 1890-1985 » au Los Angeles County Museum (LACMA) présente pour la première fois les œuvres de Klint avec celles de Kandinsky, Mondrian et Malévitch, et la désigne comme une des pionnières de l’abstraction. Si rien ne prouve qu'Hilma af Klint ait été impliquée dans le mouvement abstrait de ses collègues masculins contemporains, elle est néanmoins parvenue à une esthétique personnelle similaire, non représentative.
Pour aller plus loin
c/o Moderna Museet, Stockholm
Notice sur le portail AWARE, Archives of Women Artists, Research and Exhibitions
Présentation de l’exposition « Hilma af Klint: Paintings for the Future »
12 octobre 2018 – 23 avril 2019, au Solomon R. Guggenheim Museum,
New York
Durée : 6’59 (en anglais, sous-titrée)
Hilma af Klint, une abstraction venue d’ailleurs
Conférence de Pascal Rousseau dans le cadre du Festival de l’histoire de l’art à Fontainebleau, le 30 avril 2020
Durée : 1h
« Petites histoires de grandes artistes »
Série produite par AWARE, Archives of Women Artists, research and Exhibitions
dans le cadre de l'exposition « Be AWARE. A History of Women Artists », 2020
Durée : 4'06
À partir de 7 ans